Prix Gemini de la SF2A et de la SAF pour le programme de science participative porté par Jean Lilensten
Actuellement seuls les astronomes amateurs observent de façon globale et continue Mars lorsque la planète est au plus près de la Terre (« opposition »). Une partie de ces passionnés a été agrégée au programme de surveillance initié par Jean Lilensten, directeur de recherche à l’IPAG (l’un des laboratoires de la fédération OSUG), et Jean-Luc Dauvergne, astronome amateur. Ils ont constitué en 2018 un réseau de dix observateurs répartis sur tous les continents. Cette collaboration s’est vu décerner le prix Gemini 2023 de la SF2A et de la SAF pour leur découverte d’un nuage atypique de 3000m2 sur Mars
Légende : Évolution temporelle du système nuageux de 21h05 à 22h40 UT à travers un filtre vert sans surexposition du disque martien. À partir de 21h42 UT, les couches détachées sont clairement visibles devant le disque et projettent des ombres. Les cercles gris indiquent leur position à trois moments différents © Emmanuel Beaudoin
Le 17 novembre 2020, les Français Christophe Pellier et Emmanuel Beaudoin ont détecté et photographié, durant trois heures, une immense structure nuageuse surgissant de la nuit au terminateur. Cette découverte illustre la sérendipité en science car le but initial du programme était de détecter des aurores polaires sur Mars, et non d’étudier les nuages. Ce qui a été observé ici est atypique pour deux raisons : le complexe nuageux est gigantesque, avec une étendue de 3000 km, et est localisé à 92 km d’altitude, aux portes du vide interplanétaire. L’altitude a été évaluée par deux méthodes indépendantes, notamment par Marc Delcroix, responsable de la commission des observations planétaires de la SAF.
Le nuage diffuse la lumière à toutes les longueurs d’ondes visibles, avec un maximum dans le rouge, ce qui laisse penser qu’il est composé de particules micrométriques. L’hypothèse des poussières a pu être écartée, en revanche des cristaux de glace d’eau ou de glace carbonique sont de bons candidats. Des nuages de glace d’eau ont ainsi déjà été observés à cette altitude et à cette saison, mais avec des cristaux de glace plus petits. La taille des particules observées est compatible avec l’hypothèse du CO2, cependant, la saison d’observation est atypique. Il n’est donc pas possible de trancher entre ces deux hypothèses.
Au même moment ce 17 novembre 2020, une tempête de poussières était en développement sur Mars. Les auteurs questionnent la possibilité que cette activité ait participé à la formation de cette structure nuageuse atypique.
Références
J. Lilensten, J.L. Dauvergne, C. Pellier, M. Delcroix, E. Beaudoin, M. Vincendon, E. Kraaikamp, G. Bertrand, C. Foster, C. Go, E. Kardasis, A. Pace, D. Peach, A. Wesley, E. Samara, S. Poedts, and F. Colas Observation from Earth of an atypical cloud system in the upper Martian atmosphere, Astronomy & Astrophysics,
Contact scientifique local
- Jean Lilensten | IPAG
Cet article a été initialement publié par l’OSUG