Découvertes inattendues dans les disques protoplanétaires observés par le Télescope Spatial James Webb

Image rapprochée du disque protoplanétaire HH 30 autour d’une étoile nouvellement formée. De nombreuses longueurs d’onde différentes sont combinées et représentées par des couleurs distinctes et variées. ©ESA/Webb, NASA & CSA, Tazaki et al.



Immédiatement après leur formation, les étoiles sont entourées d’un disque massif de gaz et de poussière dans lesquels un système planétaire peut se former en quelques millions d’années.

Les particules de poussières – les briques essentielles des futures planètes, astéroides et comètes - qu’ils contiennent ont des tailles allant du micron (typique du milieu interstellaire) au millimètre, voire plus. Pour former des corps encore plus gros, les modèles actuels indiquent qu’il est nécessaire de concentrer ces poussières dans un petit volume. Cela pourrait être le résultats des forces de trainée appliquées par le gaz sur les particules. Ces forces peuvent ainsi former une couche très fine rassemblant les plus grosses poussières dans le plan médian du disque, alors que les plus petites particules resteraient fortement couplées au gaz et, donc, réparties dans toute l’épaisseur du disque. Les disques vus par la tranche offrent une géométrie idéale pour tester ces modèles. Étant donnée la taille caractéristique des disques protoplanétaires, cela nécessite l’extrême résolution des observatoires les plus puissants tels que le Télescope Spatial Hubble (HST), l’Atacama Large Millimeter Array (ALMA) et, depuis peu, le Télescope Spatial James Webb (JWST).

Au cours de la première année d’opération de JWST, une équipe scientifique impliquant des scientifiques de l’Institut de planétologie et d’astrophysique de Grenoble (IPAG-OSUG - CNRS/UGA) a obtenu des images de 4 grands disques protoplanétaires vus par la tranche pour lesquels nous disposions déjà d’images HST et ALMA. Ces nouvelles images ont confirmé la stratification des grains dans tous les disques, mais avec des degrés de sédimentation différents entre les systèmes. En particulier, dans certains systèmes, les grains atteignant une taille de 10 microns sont entraînés jusqu’à la surface du disque, ce qui suggère que ces grains sont particulièrement structurés et poreux, comme les poussières cométaires observées dans le système solaire. À l’inverse, dans d’autre systèmes, les grains de cette taille sont sujet à une forte sédimentation. Au-delà de ces tests des modèles de formation planétaire, ces observations ont révélé des éléments totalement inattendus, comme une structure en X brillante dans l’infrarouge dans un cas, ou un cocon diffus dans un autre. Dans les deux cas, ces structures sont bien plus étendues que les limites du disque telles qu’indiquées par ses composantes de gaz et de poussière, suggérant la présence de vents qui pourraient contribuer à la dissipation du disque. De tels vents ont été précédemment détectés avec des observations à basse résolution mais ces nouvelles images permettent de caractériser en détail leur taille et morphologie.

Collage de quatre petites et d’une grande images du disque protoplanétaire HH 30, prises à partir de différents télescopes et dans diverses couleurs représentant différentes longueurs d’onde de la lumière. Chaque image présente différentes caractéristiques du disque et des écoulements qui l’entourent. Elles sont étiquetées (de haut en bas et de gauche à droite) « Hubble/Visible », « Webb/Proche infrarouge », « Webb/Moyen infrarouge », « ALMA/Millimètre » et (la grande image) « Webb/Infrarouge ». Sur la grande image, la ligne sombre au centre est le disque, constitué de poussière opaque : l’étoile y est cachée et crée une forte lueur au centre. Une bande allant tout droit vers le haut est un jet, tandis que d’autres flux sortants forment des éruptions au-dessus et au-dessous du disque, ainsi qu’une queue qui s’éloigne d’un côté. © ESA/Webb, NASA & CSA, ESA/Hubble, ALMA (ESO/NAOJ/NRAO)

Comme tout nouvel observatoire qui ouvre une nouvelle fenêtre sur l’Univers, la résolution et sensibilité sans précédent de JWST ne permet pas seulement d’atteindre, voire surpasser, les objectifs pour lequel il a été initialement pensé, mais il produit également des résultats totalement inattendus qui ouvrent de nouveaux domaines de recherche.

Ces travaux ont été financés en partie par le Conseil européen de la recherche (ERC) à travers le programme européen pour la recherche et l’innovation "Horizon Europe" (projet Dust2Planets, PI F. Ménard).


Référence

JWST Imaging of Edge-on Protoplanetary Disks. IV. Mid-infrared Dust Scattering in the HH 30 Disk
Ryo Tazaki, François Ménard, Gaspard Duchêne, Marion Villenave, Álvaro Ribas, Karl R. Stapelfeldt, Marshall D. Perrin, Christophe Pinte, Schuyler G. Wolff, Deborah L. Padgett, Jie Ma, Laurine Martinien, and Maxime Roumesy
The Astrophysical Journal, Février 2025. DOI : 10.3847/1538-4357/ad9c6f

Contact scientifique local

Cet article a été publié par l’UGA.